Dossier Adrien Pasquali, « Une rencontre manquée » par D. Magetti

À l’arme blanche
ils poignardent
éventrent égorgent
– à la hache s’il le faut
ils décapitent
dans les arrière-cours
en plein jour
ou de nuit
au fond de boyaux obscurs
furieux possédés
sans fin ils torturent
étouffent s’acharnent
jusqu’à ce que mort s’ensuive.

Il y a quelques années (déjà quatorze) disparaissait Maurice Chappaz. Peu après, à la demande de la revue L’Archipel,
j’écrivais un article où je laissais poindre quelques-unes de
mes réticences 8. Je me réjouis de l’occasion offerte par La
Cinquième Saison pour continuer cette vivifiante réflexion.

Vasyl Stus, 1937-1985, est né à Donetsk, aujourd’hui aux mains des séparatistes russes, et il est mort d’une grève de la fin au camp de Perm-36. Il en était à sa seconde
peine de bagne.
Ses Palimpsestes furent écrits mentalement au goulag,
le jour – pendant le travail forcé, le soir – dans le baraquement bruyant, ou plus souvent jour et nuit – dans le cachot-isolateur. Bribes de souffrances, de cris ou de plaintes comme celles de Job, ce sont des concrétions de mots déposés sur sa douleur, concassés sous le ciel écrasant de la Kolyma et réfugiés dans les replis de sa mémoire d’Ukraine.